Il n’y a pas très longtemps j’ai fait un post sur Facebook qui parlait de la théorie de l’attachement et je me suis rendue compte que beaucoup n’en avaient jamais entendu parler. Moi même je l’ai découverte un peu tard mais, par la suite, cela m’a énormément aidée à comprendre les réactions de mes enfants que ce soit avec moi ou avec les autres. La théorie de l’attachement, ce n’est pourtant pas quelque chose de nouveau ! Cela fait quand même un certain temps que les professionnels s’intéressent à la question (depuis 1958, si si… ) mais bon, que voulez-vous, je n’ai jamais compris pourquoi les informations circulaient si mal dans certains domaines !
Pour vous aider à mieux comprendre de quoi nous parlons, je vous propose une petite mise en situation :
Cela fait des semaines que vous avez le moral au fond des chaussettes, votre enfant fait beaucoup de colères, il peine à s’endormir, vous le bercez pendant des heures et il ne vous laisse pas vous asseoir une minute. Vous vous sentez complètement au bout du roll mop alors vous décidez de vous offrir un déjeuner en amoureux, suivi d’un après-midi shopping… Pour ce faire, vous confiez donc votre enfant à des personnes de confiance. Vous culpabilisez un peu car vous vous dites que ce sera difficile et que votre descendance va sûrement leur faire passer une journée terrible mais bon comme ils se sont proposés…
A vous la journée de détente !!
A votre retour, vous demandez timidement un compte-rendu complet de la journée et là oh surprise :
“ça c’est SUUUPER bien passé, c’est un amour”, ‘Elle n’a pas pleuré une seule fois”, “Elle a fait la sieste sans problème”, “Elle a dévoré ses brocolis, qu’est-ce qu’elle a bon appétit dis-donc !”
Vous êtes ravie mais en même temps ces remarques vous font un tout petit pincement au cœur. Finalement, tous s’est bien passé sans vous. En réalité tout s’est MIEUX passé sans vous.
Et puis quelques temps après votre arrivée… Votre enfant commence à redevenir grognon !! Voilà qu’ il/elle explose en larmes et ne veut plus monter dans son siège-auto.
“C’est fou comme elle change dès que tu es là…”, “Avec moi ça se passe bien, prends en de la graine hein?”
A ce moment là, il n’y a qu’une seule et unique conclusion logique qui vous traverse l’esprit : “Je suis nulle, je ne sais pas m’y prendre” !
Et si je vous disais qu’en fait c’est tout l’inverse !
Ni vous, ni votre enfant n’êtes émotionnellement perturbés et ce que vous vivez est en fait une situation très normale que de nombreux parents rencontrent.
Cette différence de comportement de votre bébé quand vous n’êtes pas là peut s’expliquer (en grande partie) par la théorie de l’attachement.
Je vais essayer de synthétiser, mais je crois que finalement c’est quelque chose d’assez simple à comprendre, et dont on prend conscience au fil de nos expériences en tant que parents.
Qu’est-ce que la théorie de l’attachement ?
Le principe de base est qu’un jeune enfant a besoin pour connaitre un développement social et émotionnel normal, de développer une relation d’attachement avec au moins une personne qui prend soin de lui de façon cohérente et continue. En règle générale, la figure d’attachement est la personne qui s’est occupée de l’enfant quotidiennement pendant les premiers mois de sa vie. C’est la personne qui a le plus répondu à ses besoins. C’est quelque chose qui n’a absolument rien à voir avec l’amour mais l’enfant hiérarchise ses figures d’attachement. Il peut en avoir plusieurs mais il y en aura systématiquement une au-dessus des autres.
Il faut noter aussi que l’attachement et l’amour sont deux dimensions bien distinctes du lien affectif. En effet, les parents peuvent aimer profondément leur enfant mais ne pas répondre à ses besoins d’attachement de façon adéquate.
Lorsque vous laissez votre enfant dans un environnement qui lui est étranger, il ne s’autorisera pas à exprimer pleinement sa tristesse ou son stress.
Quand vous faites garder votre enfant ou que vous le mettez à l’école, il accumule des “tensions”. En effet, ses journées sont parsemées de découvertes, d’apprentissages, de déceptions, de frustrations, de stimulations sonores, visuelles…. Toutes ces tensions, il ne s’autorisera à les évacuer qu’en présence de sa figure d’attachement, c’est à dire la personne qui lui garantira le maximum de sécurité. Pourquoi ? Parce qu’il sait que sa figure de l’attachement est source d’amour inconditionnel. Elle continuera à l’aimer malgré tout. Les figures d’attachement sont les seules personnes avec lesquelles l’enfant va se laisser aller.
D’un point de vue évolutionniste : les cris ou les pleurs qui suivent l’éloignement de la figure d’attachement sont considérés comme une réponse normale et adaptative. C’est le comportement que la sélection naturelle a favorisé des millions d’années durant, parce qu’il favorise la survie de l’individu. Lorsqu’un bébé se sent en situation de détresse, il va chercher de manière tout à fait instinctive à rétablir le lien physique avec l’une de ses figures d’attachement. Si la figure d’attachement s’en va, l’enfant se fera discret et se montrera volontiers sous son meilleur jour. Parce que c’est sa meilleure stratégie de “survie” en attendant qu’elle revienne.
Au cours des années 60 et 70 Mary Ainsworth, psychologue du développement, va enrichir la théorie en y ajoutant la notion d’attachement “secure” ou “insecure”.
L’attachement dit “secure” est celui favorisé par une figure d’attachement réceptive, sensible aux besoins de son enfant et utilisée par celui-ci comme base de sécurité pour explorer son environnement. Les enfants “secures” recherchent le réconfort de leur figure d’attachement au moment de la séparation, protestent voire manifestent leur détresse mais se calment facilement dès son retour. Ils sont capables de reprendre leurs activités d’exploration une fois qu’ils sont rassurés. Avant un an, l’enfant “secure” peut demander beaucoup de proximité physique.
Attention, je ne dis pas qu’un enfant qui va volontiers à la crèche ou chez ses grands-parents n’est pas un enfant secure. Chaque enfant est différent et chacun a son propre degré de tolérance à la séparation. Cela varie beaucoup en fonction de l’âge (il y a des périodes plus sensibles notamment au moment des fameuses angoisses de séparation). De la même façon, un enfant qui est en pleine poussée dentaire ou un peu malade aura plus de mal à se séparer de sa figure d’attachement.
Cette sécurité interne que votre enfant va acquérir grâce à vous lui permettra d’être par la suite plus autonome. Je parle là de la VRAIE autonomie (pas de l’enfant qui est autonome parce qu’on l’a forcé à se débrouiller seul).
Les bases relationnelles de tout individu se forgent et sont déterminées par les relations vécues dans la petite enfance.
Encore une fois je ne suis ni coach, ni psy. J’ai découvert cette théorie quand mon fils était petit et je pense qu’elle mérite d’être plus largement diffusée.
Aujourd’hui, on perpétue toujours l’image de la mère poule qui n’arrive pas à se détacher, on pousse toujours plus à la séparation précoce, on demande aux parents de ne pas céder à toutes les demandes affectives de leurs enfants, afin de les rendre plus indépendants, plus autonomes…
Et je pense que tout ceci va complètement à l’encontre des besoins naturels de nos bébés.
On ne va pas refaire le monde, mais j’espère que cet article vous aura en tout cas aidé à voir les choses sous un angle différent.
Je vous embrasse et vous dis à bientôt !
Eva.
Crédit illustration : Nathalie Jomard
Super article !!
Merci beaucoup 🙂
Bonsoir, je partage tout à fait votre texte, malheureusement moi non plus je ne connaissais pas cette théorie pour ma première fille, qui a essuyé les plâtres…on a essayé de faire au mieux avec nos réflexes archaïques et j’espère de tout cœur qu’on ne l’a pas trop “abîmée”…
Parce que quand on réfléchi à notre propre éducation, je suis convaincue que nos parents ont fait de leur mieux mais toute autant convaincue que certaines de mes “failles” viennent de là…
J’ai essayé de faire mieux avec ma seconde et encore plus avec son frère, on grandi avec eux finalement !
Bonsoir ! Merci d’avoir partagé votre expérience. “on grandi avec eux”, c’est exactement ça ! La parentalité est un long chemin et je crois que cette histoire de figure d’attachement dure toute la vie ! C’est très compliqué de s’affranchir de nos réflexes, qui sont directement liés à l’éducation que l’on a reçue… Et puis il faut aussi arriver à gérer nos émotions… Et ça, personne ne nous a vraiment appris à le faire 😉 Alors ne nous jugeons pas trop durement, je crois que chacun fait de son mieux avec son bagage, ses failles et les informations qu’il a reçues 🙂